mercredi 22 octobre 2014

Twilight etc...par Clémentine G.

J'ai écrit il y a quelques temps l'article suivant : Y'en a marre du Mal !  et cela a inspiré mon amie Clémentine G. Voici ce qu'elle a écrit :

J’aime Harry Potter, j’aime Buffy contre les vampires. Dans la même veine que Le Seigneur des anneaux et que des mythes fondateurs, ce sont pour moi des sagas héroïques et exemplaires qui nous font nous sentir capables de sacrifier notre vie pour un intérêt supérieur, pour une cause juste qui nous dépasse et s’enracine dans l’humanité, dans le sens d’essence humaine.

Plus particulièrement dans ces deux oeuvres, les personnages sont dessinés assez finement et illustrent bien la complexité humaine avec les questionnements qui occupent notre - ou en tout cas mon - quotidien, l’aspect vampire - loup-garou - zombie et autres évidemment sous d’autres formes.

Ces deux histoires nous présentent un-e adolescent-e confronté-e plus ou moins brutalement à des responsabilités qui le dépassent et à la dureté du monde. Il est désigné comme étant spécial, “l’élu”, rôle qu’il n’a pas choisi et qu’il a du mal à accepter, qu’il subit parfois. Il est confronté à la mort de ses proches, à l’injustice, la peur, au sentiment de ne pouvoir rien faire et pour équilibrer un peu quand même à l’amour, l’amitié, le réconfort, la fierté, l’accomplissement etc…

Les histoires pour enfants, les mythes anciens, les contes de fées ont toujours eu un rôle important dans l’éducation. Je me souviens de l’introduction de Bruno Bettelheim à son livre - qu’il faudrait quand même bien que je lise en entier - Psychanalyse des contes de fées. Si j’ai bien compris son propos, la violence présente dans les contes de fées (les soeurs de Cendrillon se coupent le talon pour que leur pied entre dans la chaussure de vair, si si) a un rôle capital car symbolique pour l’enfant, qui retrouve dans l’histoire et les personnages des exemples à suivre (pas littéralement) ou des solutions à des problèmes qui le travaillent à ce moment-là. M. Bettelheim disait entre autres choses par exemple qu’il était important d’écouter l’enfant quand il demande à relire toujours la même histoire, car cela peut signifier qu’il y trouve matière à réfléchir. Certes, la moitié de cela se passe dans l’inconscient mais bon..

Revenons à nos moutons.

Pour moi et pour les raisons que j’ai données ci-dessus, Harry Potter et Buffy contre les vampires sont à la hauteur pour tenir ce rôle auprès des spectateurs.
Contrairement à Twilight.

J’ai longtemps attendu avant de céder à la curiosité de regarder cette nouvelle série (de films), et je n’ai pas (encore?) lu les livres, contrairement à Harry Potter pour lequel j’ai fait les choses dans les règles de l’art (d’abord les livres, puis les films. Je me suis toujours demandé quel était le meilleur ordre? Bref.. ).

Twilight me perturbe, j’ai mis un moment  à comprendre pourquoi et je n’ai pas encore totalement résolu cette question. Certaines choses sont appréciables (l’ambiance, la musique, l’image, les acteurs globalement), d’autres moins (les paillettes et les ralentis cuicui dans la forêt…) et je n’ai pas pu m’empêcher de tous les voir (et revoir) tout en n’appréciant pas le fond. Une espèce d’attirance/rejet étrange.

Catalogué film de fille, parce que “j’ai 18 ans et je t’aime et je t’aimerai toujours et je mourrai si tu m’aimes plus”, je comprends je comprends. Sauf que au final, tout est sacrifié au nom de “happy ever after”, c’est d’ailleurs comme ça que ça se termine (attention, je spoile). Ah oui, parce que en plus les vampires, s’il se débrouillent bien, sont immortels donc là on parle d’un vrai “ever after”, pour toujours toujours.

Qu’est-ce qui est sacrifié, me direz-vous?

Et bien le supérieur, ce qui dépasse les autres et la raison pour laquelle les autres se battent: ce qui dépasse le groupe restreint de la famille, des amis proches ou de la communauté à laquelle on appartient et qui a trait à des principes globaux de vie ensemble.

Dans Twilight, les Volturi font la loi pour ce qui concerne les vampires et maintiennent une sorte d’ordre, mais ce ne sont pas des figures d’autorité comme celles que l’ont trouve dans les autres oeuvres : ils font leur loi et parfois au mépris de la (leur) justice. C’est amusant de remarquer que pour une fois des Russes ont raison dans un film américain (je trouve) : les deux personnages qui ne sont venus que pour se battre et pour régler leurs comptes - certes - sont les seuls à dire que c’était l’occasion de se libérer du poids des Volturi. Mais justement cette occasion n’a pas été prise par les protagonistes.

La scène de bataille finale est belle et justifiée par tout ce qui précède, des gentils meurent, mais ça fait partie du jeu. La réelle fin du film ne l’est pas et gâche tout à mes yeux. Cela veut dire que le clan des héros est prêt à continuer à vivre sous le joug de cette famille du moment qu’ils ne viennent pas dans leur jardin leur piquer des carottes. La morale de l’histoire est donc très égoïste, et c’est cela qui me gêne profondément. L’auteur a tout sacrifié pour préserver le bonheur éternel de ses deux personnages principaux. Et c’est pas cool.

Après avoir mis le doigt sur ce qui m’irritait, je me suis demandée si ce n’était pas symptomatique de la société actuelle dont certaines valeurs sont contestables, à mon avis. C’est une réelle question car je n’ai pas de connaissance très étendue de ce genre littéraire ou au cinéma, et je n’ai confronté que les oeuvres que j’avais lues ou vues. Je ne sais pas si c’est une tendance ou si d’autres ouvrages comparables existent déjà depuis longtemps, mais pour que le plus récent, Twilight, ait eu le succès que l’on connait, il faut bien que cela résonne chez les spectateurs et je trouve que c’est inquiétant.

Alors bien sûr c’est du divertissement et on est pas obligé de réfléchir à tout tout le temps machin. 

Mais ça n’empêche pas que du divertissement peut ne pas être abrutissant et peut être AUSSI enrichissant. J’aimerais citer Alexandre Astier dans sonpassage dans l’émission de M. Morandini face à la mère d’un participant à uneémission de téléréalité, mais je ne me souviens plus exactement de ses mots… Je citerais aussi bien Antoine de Caunes, qui parlait de l’émission “Les enfants du rock” : il disait qu’à cette époque la télévision publique diffusait desémissions pour TOUS les publics. Aujourd’hui toutes sortes de prétextes sont évoqués pour présenter à un seul public des programmes affligeants. 

Depuis quand a-t-on décidé que l’intelligence était à bannir des médias? Depuis quand les spectateurs ne sont plus considérés dignes d’intérêt pour les projets culturels de masse? Car on parle toujours bien de culture. Et la culture, c’est l’humanité. Et l’humanité avec les Cullen, ben elle durerait pas longtemps.



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